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Le colonel Sanders, mascotte du KFC, a rejoint le monde du dating, dans le dernier exemple de la façon dont les marques tentent de faire de l’œil aux nouvelles générations de consommateurs.

Le vrai colonel Harland Sanders, connu pour ses lunettes browline, son nœud papillon noir façon western et ses cheveux blancs comme la neige, est mort en 1980 à l’âge de 90 ans. Le personnage emblématique de la chaîne de restauration rapide, née il y a 67 ans, a depuis survécu sous diverses formes, et notamment dans une série de publicités depuis 2015 où plusieurs célébrités l’incarnent.

Plus jeune et plus en forme que jamais, la mascotte évolue maintenant dans un nouveau jeu vidéo, sorti mardi, qui invite les joueurs à tenter de gagner son cœur… Dans « I Love You, Colonel Sanders ! A Finger Lickin’ Good Dating Simulator », réalisé par le studio new-yorkais et angeleno Psyop, le colonel est représenté, dans une version dessin animé, sous les traits d’un grand chef aux airs de hipster. Les joueurs répondent à une série de questions qui déterminent leur destin pendant qu’ils naviguent dans une cuisine virtuelle avec l’espoir de l’impressionner par leur savoir-faire en matière de poulet frit.

Le projet s’adresse aux fans de simulations de dessin animé et de rencontres, explique Jarrod Higgins, directeur créatif de l’agence de publicité de KFC, Wieden+Kennedy. En avril, la chaîne de fast-food avait déjà présenté un modèle masculin buriné, généré par ordinateur, inspiré par l’ancienne mascotte, dans une série de photos kitsch sur Instagram.

« Nous nous sommes définitivement éloignés de la recette originale, salue Adriane Pontecorvo, une DJ de radio de 29 ans, habitant Bloomington dans l’Indiana, à propos de la nouvelle personnalité sexy du chef. Ça me plaît beaucoup. »

D’autres ne goûtent pas ce changement. Dianne Klein, qui a travaillé dans un restaurant KFC à Fair Oaks, en Californie, alors qu’elle était adolescente dans les années 1970, a mal au cœur à l’idée que l’on puisse sortir avec le colonel, quelle que soit son apparence. A l’époque, une grande statue en plastique du vieux fondateur, qui lui rappelait le Père Noël, trônait devant le restaurant, se remémore-t-elle.

« De toute évidence, ce n’est plus de ça qu’ils veulent », note Mme Klein, chef de cabinet de l’organisme d’investissement de l’Université de Californie.

Le colonel n’est pas la seule mascotte à rajeunir en vieillissant. En 2012, Quaker Oats a affublé son vénérable Quaker Larry d’une coupe de cheveux plus courte et d’épaules plus apparentes pour qu’il paraisse plus costaud, sans chercher toutefois à le rendre sexy. M. Propre de Procter & Gamble et Brawny, de Georgia-Pacific, ont également fait peau neuve pour aider ces marques à attirer les jeunes consommateurs.

Trouver le bon nouveau look peut s’avérer difficile. Au début des années 2000, les cadres de Leo Burnett ont passé des mois à étudier le fameux « Doughboy Poppin’ Fresh », la mascotte de la société d’agroalimentaire Pillsbury, se souvient Cheryl Berman, ancienne présidente et directrice artistique de l’agence de pub, qui appartient au Groupe Publicis. Ils avaient, entre autres, envisagé de doter la mascotte d’une petite amie, de la rendre plus grande et plus souple. En fin de compte, aucun changement n’avait été apporté à l’ambassadeur de la marque Pudgy, vieille de plusieurs décennies, raconte Mme Berman.

« Les études ont montré qu’il ne fallait pas y toucher, alors nous avons actualisé et fait évoluer ses histoires, mais pas lui », poursuit Mme Berman, aujourd’hui à la tête de la société de création publicitaire Unbundled de Chicago.

L’enjeu est de taille. Beaucoup de gens n’ont pas apprécié lorsque, en 2014, McDonald’s pourvu Ronald McDonald d’un look urbain et branché avec un pantalon cargo et une veste rouge. Les critiques se sont multipliées sur les réseaux sociaux, renommant, par exemple, le clown emblématique « Ronald McConnard », alors que le magazine Esquire disait à l’époque que la nouvelle tenue ressemblait à un « costume d’église de tueur en série ».

Le déploiement de nouvelles versions du colonel constitue pourtant une affaire sérieuse pour une chaîne qui tente de maintenir la croissance de ses ventes, tout en luttant contre des concurrents comme Chick-fil-A et Popeyes Louisiana Kitchen, la filiale de Restaurant Brands. Au fil des ans et des campagnes publicitaires, la mascotte a été joué par des célébrités telles que les acteurs Reba McEntire et Ray Liotta.

« Notre stratégie a été de trouver de nouvelles façons intéressantes et provocatrices d’intégrer le colonel à la culture pop, a indiqué dans un communiqué Andrea Zahumensky, directeur pour les Etats-Unis du marketing de KFC, qui appartient à Yum Brands. C’est toujours notre étoile du berger. »

L’utilisation des jeux vidéo et des réseaux sociaux pour atteindre les consommateurs est une méthode populaire chez les annonceurs depuis que davantage de personnes, surtout les plus jeunes, regardent moins la télévision et sont moins exposées aux publicités qui y sont diffusées, explique Allen Adamson, cofondateur de Metaforce, une agence de marketing new-yorkaise. Mais ce n’est pas la recette du succès garanti.

« Il n’existe pas toujours une corrélation directe entre le fait de se faire remarquer et la croissance du chiffre d’affaires, rappelle M. Adamson. La question reste : vont-ils vendre un seau de poulet en plus ou pas ? »

Tyler LeBeau, un informaticien de Chicago âgé de 31 ans qui est aussi catcheur et joue régulièrement à des jeux vidéo, déclare que le nouveau jeu de rencontres de KFC n’est pas attrayant. « Ça n’a pas allumé la flamme », conclut-il.