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Luxembourg : Interview de rentrée avec Laurent Schonckert, CEO de Cactus

Quelles seront les principales échéances qui attendent l’enseigne Cactus ?

«Nous avons acquis à Ettelbruck l’ancien bâtiment Monopol il y a trois ans. Nous sommes en train de réaménager le bâtiment pour en faire un Cactus Marché. Nous avons déjà été présents une douzaine d’années dans la zone piétonne d’Ettelbruck, mais en tant que locataires. Cette fois, nous serons propriétaires. Ce nouveau point de vente ouvrira en novembre, c’est donc notre échéance la plus proche.

Au niveau de notre enseigne Shoppi, nous avons signé un accord au printemps dernier avec la société qui exploite les stations Texaco au Luxembourg. Ça nous permettra d’ouvrir 10 nouveaux magasins de proximité d’ici le début de l’année prochaine. Ils s’ajouteront aux 22 existants. C’est une très bonne nouvelle étant donné le succès de la proximité un peu partout en Europe.

Si je me projette un peu plus loin, en 2019, notre centre commercial La Belle Étoile fêtera ses 45 ans. Ce sera aussi un grand moment pour nous. Enfin, au niveau de l’expansion du réseau, nous travaillons encore à deux grands projets: un Cactus Marché à Roodt-sur-Syre et le centre commercial de Lallange pour lequel nous sommes parvenus à bien avancer au niveau des autorisations. Nous devrions donc pouvoir ouvrir ces deux points de vente d’ici deux à trois ans.

D’autres grands projets vont sortir de terre dans le pays. On voit arriver le centre commercial Auchan à la Cloche d’Or, le Royal-Hamilius au cœur de la capitale et l’extension du City Concorde. Ça reste un sujet de préoccupation pour vous?

«Je n’ai évidemment pas de boule de cristal et je suis incapable de dire si le marché luxembourgeois ou de la Grande Région sera capable de digérer ces nouveaux mètres carrés. Je propose qu’on se revoie dans un an, nous y verrons un peu plus clair. Mais ce qui est certain, c’est que ces nouvelles surfaces vont changer la donne. Reste à voir qui va en profiter et qui va payer les pots cassés. Tout le monde se prépare et pense que les dégâts seront pour les autres… Nous verrons bien.

En tant que distributeur alimentaire, avez-vous le sentiment d’être impacté par les progrès du commerce électronique?

«C’est vrai que nous sommes essentiellement une chaîne alimentaire, mais nous gérons aussi du non-alimentaire dans certains points de vente. Il faut faire la différence entre les deux. Ce que je constate, c’est que de nombreux acteurs de l’alimentaire se sont essayés au commerce électronique sous différentes formes. Mais, comme je l’ai déjà dit, tout le monde tente le coup, mais personne ne trouve la formule qui assure la rentabilité. Un jour, le commerce alimentaire obtiendra une part de ce gâteau au Luxembourg aussi, mais je n’ai aucune idée de la proportion que ça prendra. Par contre, dans les magasins où nous disposons d’une offre en non-alimentaire (textile, hi-fi, etc.), nous observons clairement qu’une partie du chiffre d’affaires part vers le commerce électronique.

Les cartes de fidélité dans la grande distribution sont apparues il y a environ un quart de siècle chez nous. À une époque où l’on parle abondamment de big data, quel bilan tirez-vous de leur exploitation?

«La carte de fidélité Cactus fêtera ses 10 ans en 2019. Nous n’avons donc pas été un pionnier. Mais aujourd’hui, 85% de notre chiffre d’affaires est réalisé avec des clients détenant notre carte. C’est un score très élevé. Ce succès est notamment lié à nos programmes de fidélité, donc à l’offre temporaire de gammes de produits. Le client peut aussi obtenir des bons d’achat, mais ces actions temporaires nous permettent de nous démarquer. Par contre, nous ne voulons pas exploiter les données de nos clients, même si la carte nous en offre la possibilité. Premièrement, parce que le Luxembourg est un petit pays où la vie privée pourrait être mise à mal. Ensuite, il faudrait mettre en place une équipe pour exploiter ces données, avec un coût important à la clé. Enfin, nous avons créé un bon maillage au niveau du pays et nous connaissons déjà très bien notre clientèle. Notre assortiment est adapté en fonction de cette clientèle locale.

Et, selon vous, les grands acteurs de la distribution utilisent-ils vraiment ces données?

«Je sais qu’elles sont fortement exploitées dans les pays anglo-saxons. Les distributeurs y pratiquent effectivement le mailing ciblé selon le profil d’achat du client. Mais c’est dans les mœurs des pays anglo-saxons. Pour le reste du marché, j’ai peu d’informations.

La conjoncture économique a été particulièrement bonne en Europe ces 18 derniers mois. L’avez-vous clairement ressentie au niveau des ventes?

«On voit effectivement que les chiffres sont bons. Les prévisions de croissance du PIB pour 2018 et 2019 sont de 4% pour le Luxembourg. Le taux de chômage est tombé à 5,5%, son taux le plus bas depuis sept ans. Mais l’homme de la rue les ressent-il automatiquement? Ce sont de bonnes bases, mais insuffisantes pour évaluer le succès ou pas. Le succès de Cactus vient, selon moi, de différents facteurs. Nous sommes notamment en phase de modernisation de notre parc de magasins.

Sur les deux premiers supermarchés déjà rénovés, nous observons clairement un effet sur le chiffre d’affaires. Nous avons ouvert aussi deux points de vente, à Marnach et à Bettembourg, ce qui nous a amené de nouveaux clients, notamment dans le Nord. Enfin, nous avons fait des efforts au niveau de l’offre, en produits locaux, mais aussi dans la gamme bio et en convenience food. Donc, effectivement, on peut dire que la conjoncture est favorable, mais nous avons également bien fait nos devoirs.

Une indexation des salaires comme on vient de la connaître, c’est important pour un groupe comme le vôtre?

«C’est comme une médaille à deux faces. Du pouvoir d’achat supplémentaire, c’est toujours intéressant pour un commerçant. Par contre, si je me place en dirigeant d’entreprise, je regarde cela comme une charge supplémentaire. Or, chez nous, à côté des loyers et des amortissements, les salaires sont le plus gros poste de frais. Et nous subissons une pression sur les prix qui ne permet pas de répercuter ces hausses de charges sur les étiquettes. Bref, c’est une réalité socio-économique du Luxembourg avec laquelle il faut vivre. Je n’imagine aucun gouvernement abolir cette indexation, sauf cas de force majeure.

Si vous aviez une chose à demander au futur gouvernement, ce serait quoi?

«On parle beaucoup de croissance qualitative et certains en viennent même à s’interroger sur le besoin de croissance. Mais, sans croissance, on met en péril le modèle économique luxembourgeois. Si elle est bien gérée, la croissance profite à tout le monde. C’est sur elle que repose une partie de notre paix sociale. Je demande donc au futur gouvernement de ne pas freiner la croissance de manière artificielle. La situation est similaire pour une entreprise. Si celle-ci ne connaît plus de croissance, à moyen ou long terme, des problèmes surviendront à coup sûr. En plus, le Luxembourg est déjà bien avancé sur le volet qualitatif de la croissance. Je le vois quand nous devons construire un nouveau supermarché. Les exigences sont déjà très importantes, notamment au niveau environnemental. Et tout cela a un coût.

Et de manière plus générale, à quoi demanderiez-vous aux futurs élus d’être attentifs?

«J’ai envie de rappeler que le Luxembourg n’est pas seulement une place financière. On y trouve aussi de l’industrie et de l’artisanat. Or, quand j’observe le débat autour de l’usine de yaourts de Bettembourg, je me pose des questions. Ne cassez pas les initiatives industrielles, artisanales ou commerciales. Nous ne sommes pas uniquement un pays de services.»

Source : Paperjam.lu

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